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L’autre versant du langage

L’Autre versant du langage décrit un langage spécifique formant un système complet. Tout en se greffant sur du discours, ce langage n’est pas destiné à la communication, et il s’oppose même au discours ordinaire en ce qu’il donne la primauté au signifiant. De surcroît, il est limité à celui qui l’émet, et n’est pas fait pour être compris. Il n’émerge que dans des circonstances particulières, non maîtrisables, hors de la volonté consciente du sujet : au contraire, il lui échappe. C’est un lieu de création verbale constante. Il n’est soumis à aucune des grandes lois linguistiques saussuriennes : il ne connaît pas la linéarité grâce à sa polyvalence et à sa densité, ni non plus l’arbitraire du signe puisque le sujet projette sur lui des motivations liées à sa lettre. Le caractère latent de ce langage, ce qu’il a de fruste dans sa souplesse et de simple dans ses opérations le rendent fulgurant ; mais corrélativement, l’ordre du signifiant se caractérise par la répétition. D’où une organisation cyclique du temps, qui lie le signifiant à la mémoire, au rythme et au nombre.

Michèle Aquien
Editions José Corti, 1997

Ces caractéristiques rencontrent pleinement ce que Lacan appelle la lalangue, constitutive de l’inconscient « structuré comme un langage ». A cet aspect est consacrée la deuxième partie de cet ouvrage.
La troisième est consacrée à la poésie (en particulier la poésie moderne), qui rend manifeste une dimension supplémentaire, puisque le poème dans son entier fonctionne comme un signifiant, une structure de nomination pour un signifié autrement indicible. Le langage poétique est l’écriture même de ce qui fait qu’il y a du sujet, il lui parle là où il y a du sens pour lui, avant toute compréhension. Aussi le signifiant ne doit-il pas être pris comme et dans une valeur, mais il s’agit de dégager ce qu’il apporte de neuf, ce en quoi il fait vivre et met en forme telle structuration signifiante, en l’utilisant d’une manière qui lui est propre pour porter l’unité du sens.

Michèle AQUIEN est maître de conférences à l’Université de Paris XII où elle enseigne la stylistique et la poétique.