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(Pas) tout sur la mère

L’idée selon laquelle la naissance est un traumatisme où vient se rompre le tout que forment la mère et son enfant n’est pas un mythe freudien .C’est Otto Rank qui est à l’origine de ce mythe ; Freud ne l’a jamais cautionné, et selon Lacan ? Cette construction a, « vicié la pensée analytique » en soutenant l’illusion d’une fusion idéale, originelle, dont la reconquête serait possible.

École Freudienne - Actes du Colloque
École Freudienne, 20 et 21 mai 2000

L’art s’est bien souvent fait le vecteur de ce mythe d’une union parfaite retrouvée . Ainsi le célèbre tableau de Raphael, « La Vierge à la chaise », placé par l’artiste dans un cercle ( tondo ) qui accentue la puissance de l’image, est une représentation de la plénitude et de l’unité ; mais Jean-Baptiste est là pour nous rappeler qu’elle n’est qu’illusion. En remarquant le geste de l’enfant qui semble chercher sous le châle de sa mère le sein nourricier, on pense aux propos de Lacan sur la fonction du sein : « objet partiel, c’est lui qui est au principe de l’imagination du tout ».

Lieu où s’adresse la demande de l’enfant , la mère est au delà, ailleurs, en dehors de ce mirage du tout que supporte l’objet (a). C’est de ce lieu qu’elle va exercer sa « loi de caprice » , revêtir pour l’enfant , les habits de la puissance, de la toute puissance, puis se découvrir manquante et du même coup dévorante - gueule grande ouverte , imprévisible, angoissante, où l’enfant ne peut que patir de la satisfaction qu’il pourrait y trouver. De cette « gueule de crocodile » ( l’expression est de Lacan ), seul peut le mettre à l’abri, tel un « rouleau de pierre » empêchant les mâchoires de se refermer , le phallus qui assure la triangulation. Encore faut-il que, pour la mère, la place du père ait été marquée afin qu’un homme puisse y venir, comme agent de la castration. Elle permet ainsi qu’il y ait, pour l’enfant, du père.

Qu’est-ce donc qu’une mère ? C’est la question que nous proposerons d’étudier au cours de ce colloque. Nous aurons à interroger le désir d’enfant, diversement articulé au désir d’un homme, le devenir mère pour une femme, et le rapport à la jouissance qu’elle permet, sans omettre de questionner les éventuelles retombées, sur ce qu’est une mère, des avancées de la science (Échographie, FIV, mères porteuses...) . C’est en tant que femme « plongeant ses racines dans la jouissance même » qu’elle porte son enfant vers le plus-de-jouir, à condition de lui rester interdite.